PAR AJ ASCAGNE LE 03 novembre 2020
Même boîte à outils, mais mieux garnie. Pour faire face à la crise économique - inévitable après la décision de reconfiner le pays -, le gouvernement a décidé de recourir à nouveau à l'arsenal de mesures qu'il avait mis sur la table au printemps, lors du premier confinement. Chômage partiel, exonération de charges sociales, fonds de solidarité, prêts garantis d'Etat : les dispositifs utilisés avec succès sont reconduits, mais pour des montants souvent supérieurs, signe de l'aggravation de la crise.
Seule nouveauté, Bruno Le Maire, le ministre de l'Economie, a décidé de dégainer un dispositif fiscal qui doit permettre de réduire les loyers des commerces les plus en difficultés , répondant ainsi à une demande récurrente de plusieurs secteurs.
Le fonds de solidarité, mis en place au printemps pour venir en aide aux PME et aux indépendants, va acquérir une nouvelle dimension. Le gouvernement a décidé d'y consacrer 6 milliards d'euros supplémentaires. Pour le renforcer, Bercy a décidé d'élargir considérablement les conditions d'accès. Ainsi en mars, le dispositif prévoyait une aide d'un montant maximum de 1.500 euros par mois aux TPE de moins de 10 salariés faisant l'objet d'un arrêté de fermeture administrative. A partir du 1er novembre, ces critères seront revus : l'aide maximale sera de 10.000 euros par mois et pourra être versée à toutes les entreprises ayant 50 salariés au maximum. Les entreprises de certains secteurs sinistrés (culture, sport, hôtellerie, restaurant...) pourront aussi bénéficier de ces 10.000 euros en cas de perte de 50% du chiffre d'affaires.
Pour toutes les entreprises qui resteraient ouvertes mais seraient malgré tout durement touchées par la crise, Bercy a décidé de réactiver l'aide mensuelle initiale de 1.500 euros. Elle sera versée à celles dont les effectifs sont inférieurs à 50 salariés et qui peuvent justifier d'une perte de chiffre d'affaires supérieure à 50 %. Par ailleurs, tous les indépendants seront éligibles au fonds de solidarité et aux mêmes conditions que les TPE. Cela fera partie du plan global promis mercredi soir par Emmanuel Macron.
Dès mercredi, l'exécutif avait annoncé que le dispositif d'activité partielle de droit commun ne connaîtrait pas le coup de rabot normalement prévu au 1er novembre. Du coup, jusqu'à la fin de l'année, toute entreprise - hors celles fermées administrativement ou les plus touchées par les mesures sanitaires - verra son reste à charge maintenu à hauteur de 15 %, alors qu'il devait passer à 40 %. La marche pour le salarié, elle aussi, est reportée : il touchera toujours 70 % de son brut (84 % de son net) et non pas 60 % (72 %). Le durcissement des conditions est reporté au 1er janvier prochain.
Par ailleurs, pour les entreprises fermées ou les plus touchées - hôtels, cafés, restaurants, clubs de sport et leurs fournisseurs - le remboursement par l'Etat est intégral jusqu'à la fin de l'année.
C'était une un dispositif fiscal qui doit permettre de réduire les loyers des commerces les plus en difficultés notamment. Le gouvernement va mettre en place un crédit d'impôt pour inciter les bailleurs à annuler une partie des loyers. Dans le détail, ceux qui accepteront de renoncer à au moins un mois de loyer sur la période octobre-décembre bénéficieront d'un crédit d'impôt à hauteur de 30 % du montant du loyer. Imaginons ainsi qu'un bailleur loue un local à 5.000 euros par mois. S'il y renonce, il perdra seulement 3.500 euros (5.000 euros auquel il faudra défalquer le crédit d'impôt d'un tiers, soit 1.500 euros qui représenteront donc le coût pour l'Etat). Le dispositif sera ouvert à toutes les entreprises jusqu'à 250 salariés.
C'était une demande clef des PME, qui voyaient arriver à grand pas, dès mars 2021, les premiers remboursements de prêts garantis par l'Etat (PGE). Le gouvernement les a entendus. « Toutes les entreprises qui le souhaitent pourront demander un nouveau différé de remboursement d'un an, soit deux années au total de différé au lieu d'un an comme c'était le cas auparavant », a annoncé Bruno Le Maire.
Concrètement un restaurateur, un fleuriste, un libraire qui ne serait pas en mesure de rembourser son prêt à partir de mars 2021 pourra attendre 2022 pour commencer son remboursement, a-t-il précisé, soulignant que la Fédération bancaire française s'était engagée à examiner avec bienveillance toutes les demandes de différé des entreprises. « Nous avons obtenu de la Banque de France que ces demandes de différés supplémentaires ne soient pas considérées comme un défaut », a ajouté le ministre de l'Economie. Un détail fondamental : en temps normal, si un client demande un nouveau report de remboursement, il est considéré en défaut.
Bercy a enfin élargi la possibilité de prêts d'Etat : jusque 10.000 euros pour les entreprises de moins de 10 salariés et 50.000 euros pour les entreprises de 10 à 49 salariés. « Avec l'ensemble de ces mesures […], j'estime qu'aucune entreprise ne devra être confrontée à des problèmes de trésorerie comme le président de la République s'y était engagé », a insisté Bruno Le Maire.
Le mouvement d'exonérations et de report de cotisations sociales entamé au printemps va s'amplifier. Bercy annonce une exonération totale pour toutes les entreprises fermées administrativement le temps du confinement, et qui ont moins de 50 salariés. La même règle sera appliquée aux entreprises du secteur du tourisme qui auront perdu plus de 50 % de leur chiffre d'affaires.
RENAUD HONORÉ Le 30/10 à 08:00 (Les Echos)