PAR AJ ASCAGNE LE 20 mai 2020
Les 25 et 26 mars 2020, deux ordonnances sont venues adapter différentes dispositions en matière de délais, initiative du législateur pour garantir un accès réel au droit pendant l’état d’urgence sanitaire. Dès ce moment, le droit des entreprise en difficulté avait fait l’objet d’une ordonnance distincte (2020-341), en sus de l’ordonnance 2020-306 qui traitait de différents délais de droit commun (astreinte, clause résolutoire) mais dont certaines dispositions avaient aussi leur importance dans le domaine des entreprises en difficulté (délais de déclaration de créances, délai d’opposition à une ordonnance du juge commissaire etc…).
Jusqu'au 13 mai 2020, ces deux ordonnances étaient gouvernées par la même logique : le justiciable bénéficiait d’une suspension des délais pendant la période juridiquement protégée, laquelle débordait d’un mois en aval de l’état d’urgence sanitaire.
Le 11 mai 2020, la loi 2020-546 a reporté au 10 juillet le terme de l’état d’urgence sanitaire. Fort logiquement, beaucoup de commentateurs en ont déduit que la période juridiquement protégée prenait fin au 10 août et qu’un certain nombre d’actes pouvait être accompli jusqu’au 10 septembre, voire 10 octobre, la période d'extension des délais pouvant aller jusqu'à deux mois suivant la fin de la période juridiquement protégée
Or, l’ordonnance du 13 mai 2020 (2020-560) est venue doublement bouleverser cette logique. D'abord, en fixant des dates là où il était précédemment privilégié un mécanisme de délais glissants à partir de la fin de l'état d'urgence. Ensuite, en limitant ses effets à la seule modification de l’ordonnance 2020-306, celle qui concerne les délais de droit commun. Plus question d'avancer de deux cases. La période juridiquement protégée est désormais fixée au 23 juin 2020. Elle s’achève en amont de l’état d’urgence sanitaire, ce qui est assez contre intuitif.
La coexistence de l’ordonnance 2020-341 non modifiée (à ce jour !) et de l’ordonnance 2020-306 introduit donc une distorsion entre le suivi des délais procéduraux des procédures collectives et le suivi des délais de droit commun, en ce compris plusieurs actes susceptibles d’être réalisés dans le cas d’une entreprise en difficulté. Le plateau de jeu ne présente plus le même nombre de cases et le jeté de dé ne vous emmène plus au même endroit.
En conclusion, tout n’est donc pas reporté au 10 septembre/octobre. Notre ordre et syndicat professionnel poursuivent leurs travaux en concertation avec les pouvoirs publics. Restons tous attentifs et concentrés sur ce sujet très rapidement évolutif.